L’INDUSTRIE DE LA PUNITION PRISON ET POLITIQUE PENALE EN

CHRISTIAN ESTROSI MINISTRE CHARGÉ DE L’INDUSTRIE AUPRÈS DU MINISTRE
CHRISTINE LAGARDE MINISTRE DE L’ÉCONOMIE DE L’INDUSTRIE ET DE
L’INDUSTRIE DE LA PUNITION PRISON ET POLITIQUE PENALE EN

LE CHOIX D’UN DÉMÉNAGEUR PRUDENCE! L’INDUSTRIE DU DÉMÉNAGEMENT
MINISTERE DE L’ÉCONOMIE DE L’INDUSTRIE ET DE L’EMPLOI COMMUNIQUÉ
MINISTERE DE L’ECONOMIE DES FINANCES ET DE L’INDUSTRIE MARCHES


L’INDUSTRIE DE LA PUNITION. PRISON ET POLITIQUE PENALE EN OCCIDENT

Nils CHRISTIE

Autrement, coll. « Frontières », 2003.


Résumé :


L’ouvrage de Nils Christie, à travers une étude détaillée, offre une vision intéressante du droit pénitentiaire. En effet, ce criminologue de l’université de droit d’Oslo, évoque le thème principal du surpeuplement dans les prisons. Sujet d’actualité, puisque les Etats sont toujours à la recherche de solutions afin de limiter le nombre de personnes incarcérées, telles que les peines alternatives (le travail d’intérêt général en est un exemple).

Cette œuvre rédigée pour la première fois en 1993, préfacée par Denis Salas et Xavier Lameyre a fait l’objet d’une constante réactualisation suite à la forte évolution du taux de détention. C’est d’ailleurs à propos de cette progression que Nils Christie pousse, selon ces propres termes, « un cri d’alarme » destiné à prévenir les pays industrialisés des conséquences de leur politique pénale. Très pessimiste quant au devenir des ces Etats, l’auteur utilise un vocabulaire « choquant » pour décrire la réalité de la vie en prison, de façon à provoquer une réaction d’indignation chez le lecteur. La visée de l’ouvrage consiste à s’interroger sur les raisons qui amènent des pays industrialisés, développés, démocratiques et dans lesquels règnent soi-disant la Liberté, a des taux d’emprisonnement (l’auteur utilise l’échelle suivante : le nombre de détenus pour 100000 habitants) si élevés. Comment un pays peut-il s’estimer libre alors même que la sanction privilégiée en cas d’infraction à la loi se résume à une privation de liberté ? L’auteur pousse sa réflexion encore plus loin, puisqu’il recherche à l’aide de statistiques, les causes des écarts assez importants des taux d’emprisonnement entre des pays industrialisés proches en terme de valeurs.


Dans une partie de l’ouvrage, Nils Christie s’intéresse aux raisons de l’augmentation du taux de détention et illustre son analyse de statistiques, diagrammes et tableaux de comparaison entre différents Etats industrialisés. Tout d’abord, il réfute l’idée selon laquelle l’accroissement du taux de détention est lié à l’augmentation de la criminalité, c’est-à-dire que selon lui les prisons ne diminuent pas les taux de criminalité. Il souligne bien au contraire, que le crime est devenu un phénomène de masse d’après la politique pénale menée par les divers pays. En effet, on assiste actuellement à une répression quasi-illimitée, puisque les pays ont tendance à incriminer toutes sortes de faits. Ainsi, l’évolution du taux d’emprisonnement n’est que le reflet de choix politiques menés dans un Etat donné à un moment donné. Le constat général est bien réel : la plupart des Etats industrialisés connaissent un accroissement du nombre d’emprisonnements, dans la mesure où leur politique pénale suit le même chemin.

Cependant, Nils Christie relève un phénomène particulier, en insistant sur le fait qu’entre deux Etats proches géographiquement et culturellement il existe des écarts importants. A l’aide d’une description précise, il s’avère qu’en Europe Occidentale par exemple, le taux le plus bas enregistré en Islande est de 40 détenus pour 100000 habitants, alors qu’au Portugal il s’élève à 145 prisonniers pour 100000 habitants. En Europe de l’Est, la Russie enregistre un taux record de 685 détenus pour 100000 habitants. Ce qui est surprenant, c’est la différence qui existe par exemple entre les Etats-Unis et le Canada, pays proches géographiquement mais également économiquement et culturellement, le premier atteignant 709 détenus pour 100000 habitants et le second se « contentant » de 129 prisonniers pour 100000 habitants, autrement dit la population contrôlée par la justice est plus importante aux Etats-Unis que partout ailleurs. Afin de marquer ce phénomène, le norvégien Nils Christie transmet les chiffres concernant les pays nordiques, qui affichent un taux de détention moyen relativement faible compte tenu de ce qui peut être relevé dans d’autres pays industrialisés. Une des explications qu’il soumet au lecteur, accompagnée de termes particulièrement forts, concerne un fait remarqué dans la plupart des Etats développés, puisqu’il s’agit de l’importance du chômage. D’après lui, celui-ci touche davantage les populations au bas de l’échelle sociale, celles qu’il décrit comme une « classe dangereuse », puisque sans travail elles ont tendance à être exclues de la société. L’augmentation de la délinquance s’explique alors, selon l’auteur essayant de représenter l’attitude qu’ont les sociétés industrialisées à l’égard des « populations pauvres », par le sentiment d’inutilité qu’elles ressentent et naturellement leur exclusion de la communauté. C’est la raison pour laquelle de nombreuses statistiques démontrent que la majorité des détenus est pauvre et appartient souvent à une minorité ethnique : aux Etats-Unis un jeune homme noir sur trois est placé sous la main de la justice, autrement dit ces minorités sont surreprésentées dans les prisons des pays industrialisés. On n’enferme donc pas n’importe qui ! La moitié des personnes incarcérées aux Etats-Unis est de couleur noire, selon les sources de Nils Christie. Par ailleurs, l’auteur affirme la volonté des Etats de lutter contre la drogue, ce qu’ils appellent lutter contre « l’ennemi intérieur », c’est-à-dire contre les trafiquants, dealers et consommateurs de drogue qui dans la majorité des cas ne sont autres que la population en bas de l’échelle sociale (« la classe dangereuse »). L’augmentation de la durée de l’emprisonnement ainsi que la baisse du nombre de libérations constituent deux autres raisons expliquant de tels taux de détention, selon l’auteur. Il faudrait un minimum de prévenus pour une durée la plus courte possible, selon lui.


Dès le titre, Nils Christie invite le lecteur à se plonger dans le monde carcéral en le caractérisant sous forme d’image de « l’industrie de la punition », dans laquelle il associe la prison à une véritable entreprise, et les détenus n’étant que « des marchandises » selon ses termes. En effet, il souligne le fait que la prison constitue une industrie lucrative en donnant l’exemple de la production de vêtements en Russie, de la réalisation de composantes électroniques aux Etats-Unis, en réalité il ne s’agit ni plus ni moins d’un marché florissant. De plus, l’industrie carcérale est considérée par les gouvernements comme un facteur de développement, de nombreuses régions se portent candidates lorsqu’un projet de construction d’une prison est décidé, tout ceci dans un but de relancer leur croissance. Ainsi, le secteur pénitentiaire est réputé comme un vrai marché pour lequel on fait appel à des entreprises de construction de prison, des entreprises d’équipement de matériel de prison (comme les téléphones, les bracelets électroniques…), mais également et surtout des entreprises de restauration. L’industrie de la prison représente un secteur créateur d’emplois, il s’agit en effet du troisième employeur aux Etats-Unis. Les entreprises privées sont nettement sollicitées, depuis quelques années un mouvement de privatisation s’étant amorcé aux Etats-Unis et en Grande Bretagne. La concurrence des entreprises pouvant répondre à la demande des prisons s’accélère, on peut donc espérer des produits toujours plus efficaces pour une bonne répression pénale, mais des produits toujours plus chers. L’augmentation du taux d’emprisonnement ne fait qu’accroître le nombre de clients des entreprises privées travaillant pour le compte des centres de détention. Dans cette optique, on peut se demander si les intérêts économiques de l’industrie peuvent encourager la qualification des actes comme constituant des infractions sanctionnées par une peine de prison. En effet, si le but est de faire du profit, de créer des emplois…le taux de détention n’est pas sur le point de diminuer, bien au contraire l’objectif pour les prisons étant désormais de faire le plein afin que le marché soit fructueux. La technologie qui se développe en prison, comme la réalisation d’armes servant aux gardiens constitue un grand marché, mais qui peut être malsain si on l’analyse sous un certain angle. Nils Christie souligne effectivement, que cette production est réalisée par les détenus eux-mêmes, en échange de rien, cela s’apparente à une forme d’esclavage car les entreprises privées profitent de leurs services en échange d’aucune ou d’une faible rémunération, ce qui est sûr c’est que celles-ci y trouvent un très grand intérêt dans la mesure où elles font du profit, elles ne risquent pas de voir de grève poindrent à l’horizon, sans parler des indemnités de travail qui n’existent même pas.

Dans les développements opérés par l’auteur, le détenu est véritablement considéré comme une marchandise dans les pays industrialisés, il est dépersonnalisé. Nils Christie souligne ce fait notamment par l’instauration aux Etats-Unis d’un tableau des condamnations, de maniement très simple puisqu’à chaque infraction correspond une peine d’emprisonnement, celle-ci s’alourdissant en cas de condamnation antérieure du justiciable. Ici aucun autre élément n’est pris en compte, le juge a simplement à lire le tableau, sans avoir besoin de savoir l’âge du prévenu, son milieu social… Autant de critères qu’il aurait été bon de prendre en considération pour alléger les peines et comprendre la personnalité de l’auteur des faits. Voilà en quoi il est possible de parler de dépersonnalisation. Ceci constitue un inconvénient de la modernité où l’on ne prend plus le temps de connaître le prévenu, et selon le criminologue norvégien où l’on ne prend plus en compte « son comportement expressif » et peut entraîner un certain nombre d’injustices.Tout ce qui compte c’est une gestion rapide et efficace, au risque de juger des procès impersonnels et ainsi d’aboutir à une justice quelque peu standardisée.


Nils Christie met en garde les sociétés industrialisées de la dérive qui peut survenir dans l’application de leur politique pénale. Selon ce dernier « l’extermination n’est pas vue comme une exception mais comme la suite logique de l’organisation sociale dans les pays industrialisés ». Ainsi, il estime que la modernité entraîne un gros risque, dans la mesure ou il associe les camps d’extermination, l’holocauste, les goulags à ce que les Etats industrialisés vont transformer en menant de telles politiques. D’ailleurs, il rapproche la politique d’Hitler qui voulait étendre son espace vital et supprimer les populations qui ne relèvent pas de « la race aryenne », à celle des gouvernements actuels qui veulent étendre leur espace pour écouler les produits issus de l’industrie de la prison et purifier la société de toute les populations qui se sentent inutiles, et qui selon ces politiques représentent un danger et ainsi risquent fortement de se retrouver en prison. L’auteur souligne le fait que les pays industrialisés cherche à « gérer les groupes indisciplinés », grâce aux prisons qui permettent de réguler et contrôler les « masses de personnes dangereuses ». Pour illustrer son analyse il invite le lecteur à visiter les conditions déplorables dans lesquelles vivent les détenus, notamment en Russie. Au XXIème siècle, après la signature de nombreuses conventions sur les droits de l’Homme et sur la dignité humaine, comment peut-on encore traiter d’une telle manière la population carcérale confrontée à l’arbitraire ?

L’auteur conclu en s’intéressant à la façon dont les pays industrialisés ont réussi à en arriver là. La perte des valeurs essentielles, c’est-à-dire celles qui unissent les hommes entre eux, ce que Nils Christie appelle le « fond commun » en est certainement la cause car il ne faut pas oublier que les punitions ne constituent que le reflet des valeurs de la société. Or ils se trouvent que la dignité humaine constitue une valeur primordiale dans les sociétés industrialisées, pour peu qu’elle soit respectée.



Appréciation critique :


Pour les lecteurs et plus précisément ceux d’entre eux qui s’intéressent au droit pénitentiaire, un tel travail riche d’enseignements parait être un ouvrage de référence. En effet, l’auteur, analysant le monde carcéral, insiste sur l’urgence pour les Etats industrialisés de réformer leur politique pénale, de façon à lutter contre cet emprisonnement massif. Seulement, dans toutes les critiques formulées par Nils Christie, à aucun moment il ne propose de solution pouvant résoudre le problème des taux de détention trop élevés. Certes, il expose clairement les différentes raisons pouvant expliquer le surpeuplement dans les prisons, mais la vision pessimiste de l’auteur l’a certainement contraint à ne pas apporter de solutions positives à ce phénomène. Peut-être aurait-il pu aborder l’utilisation des peines alternatives à l’emprisonnement, qui pourraient permettre de désengorger quelque peu les établissements pénitentiaires. De plus, même si l’auteur laisse percevoir que la voie pénale ne constitue pas la meilleur décision il ne suggère pas d’option à celle-ci. Il n’évoque pas l’objectif de réinsertion recherché par les prisons notamment en France, puisque celles-ci ont pour effet de priver les détenus de leur liberté, mais elles ont également comme mission de les resocialiser, afin de pouvoir les réinsérer dans la société après l’exécution de leur peine. Il ne faut pas oublier que les prisons représentent une mesure d’exclusion.

Par ailleurs, Nils Christie rappelle au lecteur les fortes inégalités sociales en matière pénale. Cet ouvrage met bien en exergue l’existence d’une justice à double vitesse, dans laquelle d’un côté, des jeunes issus du milieu populaire sont surreprésentés dans les prisons parfois pour détention de drogue, et d’un autre côté lorsqu’une personne de classe sociale supérieure ou même une célébrité participe à un trafic de drogue, un simple traitement médical suffit. L’auteur a tendance à expliquer le surpeuplement en prison et le surnombre de « la population pauvre » dans les établissements pénitentiaires, par le fait que ce sont des personnes se sentant inutiles à la société, car la plupart est au chômage. Il les qualifie même de « populations dangereuses », que les pays industrialisés préfèrent voir emprisonnées, et ainsi se rendre utiles en travaillant dans les prisons et pouvant enfin participer à l’économie de la nation. Cependant, dans son analyse des inégalités sociales, l’auteur n’a pris en considération que certaines statistiques. En effet, il s’est contenté de relever les infractions punies d’emprisonnement commises en majorité par les populations de la classe en bas de l’échelle sociale et de la classe moyenne, et n’a pas évoqué toutes les infractions et notamment celles réalisées en priorité par les classes plus élevées de la société, par exemple la délinquance des affaires, l’escroquerie… Ainsi, est-il possible d’imaginer que l’auteur a voulu réaliser son étude en mettant fortement l’accent sur ces inégalités sociales, mais il est dommage de ne pas avoir fait d’analyse complète, car ses propos auraient été plus ou moins nuancés.


Dans cette perspective, Nils Christie a pris le temps d’expliquer au lecteur le sens de « l’industrie de la punition », dans laquelle la prison est devenue une véritable entreprise lucrative, et permet de relancer la croissance d’une région. Un réel marché s’organise autour des établissements pénitentiaires, facteur d’emplois, de profit. Cependant, l’auteur n’a évoqué que l’aspect économique de la prison, selon la critique d’Emmanuel Taïeb. Ce dernier soutient que l’origine sociale de l’individu ne joue pas forcément, pour certains crimes comme sexuels par exemple. En l’occurrence, le fait que le prévenu soit issu du milieu populaire ou pas ne change rien pour quelques infractions.

« Le cri d’alarme » poussé par l’auteur concerne l’ensemble des pays industrialisés, puisqu’il met en évidence que les Etats-Unis montrent le chemin de la dérive et que les autres pays notamment européens ne tarderont pas à suivre cette influence. De plus, il sous-entend pour expliquer les raisons du surpeuplement dans les prisons de ces Etats, le déclin de l’Etat social, dans lequel l’individu tient une place majeure, en bénéficiant d’allocations chômage, d’une couverture médicale…au profit de l’Etat pénal encourageant une forte répression, grâce à une politique sécuritaire destinée à rétablir l’ordre dans la rue. Néanmoins, Nils Christie a tendance à généraliser ce qui se passe aux Etats-Unis à l’ensemble des autres pays industrialisés, or les conditions de détention que l’on retrouve dans certains Etats n’existent pas dans d’autres. En France par exemple, l’Etat social, issu d’une tradition historique, prend une place prépondérante, il est ancré dans la société, et permet de préserver l’importance des droits sociaux tels que le droit au logement, le droit au travail, le droit de grève… Un certain nombre de pays européens ne peuvent se satisfaire d’un Etat absolument pénal, en France, on constate davantage un renforcement concomitant du social, avec par exemple la mise en place d’un revenu minimum d’insertion d’un côté, et du pénal avec l’intensification des opérations policières d’un autre côté.


Pour conclure, Nils Christie fait vivre au lecteur les différentes traditions, politiques, cultures, et les conditions quelquefois inhumaines de la vie en milieu pénitentiaire qu’il a découvert tout au long de ses voyages et de son expérience enrichissante. Inspiré d’écrits de grands auteurs tels que Ivan Illich et Michel Foucault, cet ouvrage peut servir de référence.










Nils CHRISTIE


L’industrie de la punition, Prison et politique pénale en Occident

Préface de Denis SALAS et Xavier LAMEYRE

Ed. Autrement, coll. Frontières, 2003, 220 pages



(première publication en langue norvégienne : 1991)

(première traduction en langue anglaise « Crime control as industry », 1993)



L’objet de l’étude de Nils Christie, ainsi que relevé dans leur préface par Denis Salas et Xavier Lameyre, est d’analyser le rôle de la prison, en ce qu’elle est un instrument d’exclusion et de défense sociale privilégié des sociétés contemporaines, comme technique de gestion des individus.


Selon l’auteur, la tâche principale de la prison dans les sociétés occidentales contemporaines est de gérer les exclus du système. Il s’agit d’un véritable choix de société qui se concrétise par des taux d’incarcération très différents, ainsi d’un extrême à l’autre, 700 détenus pour 100 000 habitants aux Etats-Unis contre 70 dans les pays nordiques.


Ceci pose la question du nombre de détenus acceptable par rapport aux valeurs fondamentales de nos sociétés. Le choix idéologique de l’auteur est clair, il défend la thèse selon laquelle la prison ne devrait être que peu utilisée en durée et pour un minimum de condamnés. Il se place dans la perspective de considérer le traitement de la criminalité comme une industrie dont la matière première est constituée des pauvres et des exclus, d’où le choix explicite de son titre.


Pour son étude, accompagnée de nombreux tableaux, cartes et diagrammes, Nils Christie a travaillé dans une perspective comparatiste des systèmes occidentaux, avec une étude plus approfondie des systèmes russe et surtout américain.


Pour ce faire, il a essentiellement utilisé des chiffres issus de rapports officiels, cités dans sa bibliographie annexée à cette note, tels que :



Il a également bénéficié de contacts personnels, en particulier avec des universitaires, essentiellement dans sa recherche sur les pays de l’Est.


Pour des raisons pratiques, j’ai choisi, dans un premier temps, de suivre le schéma dégagé par Nils Christie dans son ouvrage. Cependant, je me suis autorisé, afin de synthétiser des idées qui sont développées à des moments différents de son étude, à « piocher » des éléments que j’ai traité transversalement dans ma note. Dans un second temps, j’ai noté quelques réflexions que suscitaient en moi cet ouvrage.


  1. Thèse et problématique de l’ouvrage.


  1. Analyse du crime et de la criminalité.


La délinquance et le crime ne sont pas des données objectives mais une construction sociologique variable qui traduit l’évolution d’une société sur cette question. Ainsi, on assiste à la criminalisation de nombres de comportements mineurs qui relevaient avant du contrôle social et des morales religieuses, ce que Nils Christie qualifie de «  Dieu et les voisins » (p.28).


Pour analyser cette criminalité apparente, l’auteur a fait le choix d’examiner les statistiques pénitentiaires, à savoir le nombre journalier de détenus pour 100 000 habitants. Il a donc choisi de se placer en terme de stock et non de flux.





Europe occidentale : de 40/100 000 en Islande à 145/100 000 au Portugal, en relevant que dans deux pays voisins à structure comparable, on obtient des chiffres fort dissemblables, avec un taux de 65/100 000 en Irlande et de 125/100 000 en Grande-Bretagne.


Europe de l’Est : 685/100 000 en Russie (certes le taux était de 1 400 en 1950…), tous les autres pays ex-communistes se situant dans une fourchette plus élevée qu’à l’Ouest à l’exception de la Slovénie (40/100 000).


Amérique du Nord : 709/100 000 aux Etats-Unis (soit 2 millions d’individus) alors que le taux canadien est de 129/100 000…


Amérique centrale et du Sud : du Paraguay avec 60/100 000 au Chili qui culmine avec un taux de 375/100 000 (mais Nils Christie note les véritables limites de l’outil statistique dans ces pays et son incapacité à en tirer des conclusions réellement pertinentes).


Ces statistiques posent question. Si le volume de la criminalité n’explique pas le volume de l’emprisonnement, ainsi que démontré par le rapprochement de taux d’incarcération pour des pays comparables, comment comprendre de telles disparités ? Il s’agit à l’évidence d’un choix en terme de politique criminelle qui détermine tant l’incrimination des comportements que la politique en matière d’emprisonnement.


Nils Christie prend l’exemple de sociétés où l’on incarcère peu, ainsi les pays du Nord de l’Europe. On est en présence d’un modèle social de communauté de réflexion afin de définir ce qu’est une « sanction pénale décente ». Le modèle scandinave s’est construit, depuis la fin du 19° siècle, avec des décisions volontaristes de recherche d’un modèle social de répression acceptable, un système de « tolérance venue d’en haut » (pp.60/63).


Ainsi, aux Pays-Bas, où la tradition de tolérance est historique, mais la réflexion sur le système carcéral est également liée à l’emprisonnement de personnalités sous l’Occupation, comme en France, ce qui a conduit à un système d’emprisonnement a minima et à l’accent mis sur le traitement social des causes de la délinquance.



Et ce, même s’il existe, aux Pays Bas comme dans les pays scandinaves, une tendance à revenir à des standards européens moins libéraux en matière de lutte contre la criminalité. On peut en rechercher la cause tant dans le déclin des Etats providence lié à la crise économique que dans une nouvelle culture de « pénétration de l’industrie du management dans l’administration de l’Etat » qui pousse à privilégier l’incarcération (p.66)..


La thèse développée par l’auteur est que, dans les sociétés traditionnelles, le contrôle social et religieux suffit à assurer une certaine paix sociale. Mais, dans les sociétés industrialisées et marchandes, être pauvre n’est plus acceptable, que ce soit pour les populations concernées ou pour le reste de la société. Ce qui pose le problème du contrôle social d’une nouvelle catégorie : les exclus de la société de consommation. Ceci amène les Etats à criminaliser les comportements liés au développement de la pauvreté dans les sociétés de consommation et à développer un contrôle de classe.


Nils Christie prend l’exemple du développement du marché de la drogue qui permet à des classes défavorisées, et destinées à le rester car socialement discriminées, d’accéder aux attributs de la société de consommation. Ce qui a amené au développement exponentiel des législations anti-drogue et de la répression, que ce soit dans des pays de tradition libérale comme en Scandinavie ou aux Etats-Unis où, entre 1985 et 1995, le nombre de condamnations pour drogue a augmenté de 331% dans les prisons d’état (p.78).


Il existe d’autres conséquences de cette lutte contre une pauvreté jugée menaçante avec l’ouverture des pays de l’Est depuis la chute du Mur. En effet, la peur des pauvres se déplace vers l’Etranger, dans la mesure où ces pays ont un niveau de vie inférieur. On a donc assisté au développement de systèmes de contrôles aux frontières, avec les accords de Schengen, en vigueur depuis le 1er mai 1999, préfigurés dès 1976 par les groupes de travail intergouvernementaux tels TREVI entre les ministres de l’Intérieur de l’Union Européenne.


On assiste de fait au développement d’un double syndrome de forteresse : il ne suffit plus de contrôler ses pauvres, en criminalisant leurs comportements, il faut aussi éviter que les classes dangereuses des pays voisins ne viennent augmenter la criminalité dans nos sociétés.



  1. Analyse des systèmes répressifs russes et américains


On assiste à un mouvement général de durcissement et de renforcement du traitement pénal des problèmes sociaux depuis les années 70 et ce au détriment du traitement social. S’ajoute, dans cette évolution vers un accroissement du recours à l’incarcération, le rôle des groupes économiques liés au « marché de la punition » né de l’externalisation de la gestion de la prison. Ceci pose également la question du changement d’objectif de la sanction pénale, car dans un système où la prison est un marché, qui définit la politique pénale de l’Etat ?


  1. Le cas russe.


Selon Nils Christie, dans les pays de l’Est, dès avant et jusqu’à la chute du Mur, le système pénitentiaire avait vocation à dégager des bénéfices. Parce que le contrôle qui s’exerce sur une population de travailleurs est plus efficace en milieu carcéral qu’à l’extérieur, le système de travail dans les colonies pénitentiaires était l’un des plus efficaces du système soviétique. Les principaux types de prisons russes, hier comme aujourd’hui, sont les maisons d’arrêt, essentiellement pour les prévenus (sizo) et les colonies pénitentiaires, ex-goulags.


Les conditions de vie y ont toujours été déplorables, en particulier dans les maisons d’arrêt, mais elles se sont encore dégradées avec la désorganisation de l’Etat russe et la crise économique consécutive à l’ouverture à l’économie de marché. L’un des signes les plus marquants de cette paupérisation d’une population détenue déjà fragile est le développement alarmant de la tuberculose, près de 100 000 prisonniers en étant atteints.


Parmi les raisons qui peuvent expliquer l’augmentation du nombre de détenus et corrélativement, la dégradation de leurs conditions de détention, on peut noter le profond trouble d’une société confrontée aux ravages de l’économie de marché. Nils Christie émet l’hypothèse que, dans cette société au mode de fonctionnement peu démocratique, il convient de légitimer le recours à l’enfermement des pauvres en agitant le spectre de la mafia et de la criminalité organisée. Même si celle-ci n’est pas purement fantasmatique, elle permet de couvrir le contrôle social par l’enfermement des nouveaux pauvres générés par le système.



Pour citer Christie, « la situation à l’extérieur des prisons est telle que la pression pour contenir les membres indésirables de la population est à son maximum » (pp.92/93).


NOTA : L’analyse de Nils Christie est essentiellement axée sur le système américain, son étude de l’enfermement en Russie étant beaucoup plus sommaire. Tous les développements qui suivent sont donc issus d’une analyse du système pénal américain.


  1. Le cas américain.


Citant Michel Foucault qui, dans son « Histoire de la folie à l’âge classique », démontre que l’enfermement psychiatrique a longtemps eu pour premier but de mettre un terme au chômage de masse et non de guérir les internés, Nils Christie établit un parallèle avec le système pénal américain (pp. 96/97).


On est passé en 1983 de 643 371 détenus soit un taux d’incarcération de 274/100 000 habitants à un taux de 709/100 000 habitants. Cependant, il y a une grande disparité selon les Etats (de 117/100 000 condamnés à plus d’un an d’emprisonnement détenus dans des institutions fédérales ou d’Etat dans le Minnesota à plus de 900 dans le district de Colombie).


Il y a également une grande disparité en terme de populations incarcérées, ce qui permet de déterminer quelles sont les « classes dangereuses » au sens du système pénal américain. Le taux d’incarcération des hommes noirs est ainsi de 6,6% soit un taux de 6 607/100 000 habitants, la moitié des détenus étant constituée de noirs, alors qu’ils ne représentent que 13% de la population totale.


Dans une étude publiée en 1992, le Centre national des institutions et des études alternatives  estimait qu’à Washington, 75% des hommes noirs étaient arrêtés ou emprisonnés au moins une fois avant 35 ans. A Baltimore, à un jour donné, 56% des jeunes noirs étaient en prison, en libération conditionnelle, en contrôle judiciaire ou recherchés…





Nils Christie note une tendance au durcissement du régime dans les prisons américaines par un recours à l’isolement de plus en plus important dans le cadre d’institutions spéciales au sein des prisons comparables aux Q.H.S. (2% des détenus), mais aussi par la construction d’établissements pénitentiaires de plus en plus grands (il a même été envisagé d’aller jusqu’à 20 000 places). Il constate également un alourdissement des peines, tant en moyenne, qu’en nombre de condamnations à de longues peines. En 1996, 270 000 personnes étaient condamnés à une peine égale ou supérieure à 20 ans, 3 335 étant condamnées à mort.


Lorsqu’on recherche une explication à l’augmentation exponentielle des incarcérations, on constate que statistiquement le nombre de plaintes baisse, ainsi que le nombre de délits graves, mais par contre la lourdeur des condamnations augmente notablement. En 1980, le Bureau des statistiques du Ministère de la Justice notait que sur 1000 arrestations pour délits graves, 196 personnes étaient condamnées à une peine de prison, 332 en 1990…


Il n’y a donc pas de développement du phénomène criminel, mais une politique pénale qui fait le choix de considérer certains comportements déviants des pauvres non comme une alerte liée à une situation sociale toujours plus dégradée, mais comme un phénomène criminel. Il n’y a donc aucune réflexion sur une réforme sociale permettant d’éradiquer les causes de la délinquance. Selon le gouverneur de Californie cité par Christie, le coût annuel d’un détenu est moindre que celui d’un homme libre…


  1. Rôle et modalités du contrôle de la criminalité


« Le système pénal est influencé par les conditions du marché. L’exécution des peines est d’une grande importance économique » (p. 117). « Prison égale argent. Beaucoup d’argent. Beaucoup pour la construction. Beaucoup pour l’équipement. Et beaucoup pour la gestion. » (p. 123)




Dans son Panopticon, Bentham ne théorisait pas que la surveillance, mais il élaborait aussi des plans permettant aux entreprises privés de gérer ces institutions. Ainsi, aux Etats-Unis, en 1987, 3000 détenus étaient incarcérés dans des établissement à gestion privée, 85 000 en 1996, et la prévision était de 360 000 dans les 10 ans suivants…


Ce système repose sur l’idée que tout ce que fait l’Etat, le privé peut le faire mieux, Nils Christie cite ainsi l’étude de Charles Logan (Cf. bibliographie) qui montre l’importance de cet aspect de l’idéologie américaine. Se pose tout de même le problème du contrôle des institutions privées et corrélativement de la perte de pouvoir de la puissance publique au profit d’intérêts privés.


Les avantages d’une gestion déléguée de la sécurité, et en particulier des prisons, au privé sont réels pour l’Etat: pas d’engagement budgétaire, pas de contrainte de gestion, pas de problèmes de personnel. Mais, pour intéresser les investisseurs, les établissements pénitentiaires doivent être rentables, donc supposent des économies d’échelle, et une utilisation rationnelle des détenus. Cette pression du privé se traduit par une demande d’incarcération toujours grandissante dans des établissements toujours plus grands.


Au travers de l’étude des publicités dans les revues spécialisées, Nils Christie a dégagé trois marchés liés à l’exécution de la peine : la construction de prisons, l’équipement des prisons et la gestion des prisons. Ces marchés représentent 65 milliards de dollars pour les prisons locales en 1994. Sachant qu’il y a deux types de prisons aux Etats-Unis, les pénitenciers fédéraux et d’états pour les crimes graves incarcérant les deux tiers des détenus, le tiers restant se trouvant dans des prisons locales, auxquels il faut ajouter les populations sous main de justice suivies en milieu ouvert… soit un total de 6 200 000 personnes en 1999, dont 90 % d’hommes majeurs.


En plus de la pression économique, le système pénitentiaire subit également une pression technologique. Avec la fin de la guerre froide, on a vu l’émergence d’un ennemi intérieur qui remplaçait l’ennemi traditionnel, ce qui s’est traduit par la mise à disposition de toutes les technologies héritées de la guerre froide afin de permettre la reconversion du complexe militaro-indutriel.


On peut citer, à titre d’exemple, la tentative, peu efficace pour l’instant, de développement du bracelet électronique avec un marché potentiel 4 millions de personnes concernées, d’où la pression des lobbys. Mais aussi, le développement des tests de dépistage de drogue

ou de l’industrie des armes, Nils Christie indiquant le cas de la Californie où le taux de chômage a baissé par le développement de ces industries parallèlement au décollage du nombre des incarcérations.


Mais les prisons sont aussi des unités de production qui peuvent être rentables de par les économies faites par ces institutions, qu’elles soient privées ou publiques, qui utilisent le travail forcé, ou des conditions indignes de travail en terme de salaire et de protection sociale, pour fabriquer une bonne part des équipements desdites institutions. D’où les choix d’implantation géographique des prisons dans des sites en déclin économique, la construction, puis la gestion, d’une prison s’avérant rentable, tant par ses retombées économiques que par la création des richesses qu’elles génèrent.


Se pose cependant le problème du coût du système. Nils Christie estime à un total actuel de 210 milliards de dollars les sommes privées et publiques affectées à la répression de la criminalité, soit à peine moins que le budget militaire américain. Si un Etat choisit d’affecter, ou de déléguer, une somme aussi colossale, c’est par choix politique délibéré, fondé sur une analyse qui considère que ce choix est plus profitable.


Christie dégage ainsi deux avantages principaux : un emprisonnement massif, d’une part, absorbe une grande partie potentielle de main d’oeuvre, issue de populations défavorisées et qui ne nécessite donc plus de traitement social éventuellement coûteux, et d’autre part, aboutit à la création d’un secteur d’emploi dynamique. L’auteur a estimé qu’en 1999, sans compter les industries affectées à la construction et à l’équipement des prisons, ainsi que le suivi en milieu ouvert, les détenus et personnels judiciaire, policier, pénitentiaire (public et privé) représentaient 5,5 millions de personnes.



En 1984, une réforme de la procédure pénale a été initiée par le Congrès américain avec l’édiction d’un manuel  (« Manuel de prononcé des peines », pp. 160 et s.) par une Commission ad’hoc permettant le calcul des peines de façon quasi automatique (« US Sentencing Commission Guidelines », 1990). La Cour Suprême a confirmé la constitutionnalité de cette pratique dans un arrêt Misretta. Ce manuel a été complété par des instructions de la Commission de ne pas prendre en compte les éléments de personnalité.


De plus, Nils Christie insiste sur la perversion de la procédure de plaider coupable qui concerne plus de 90% des accusés (99% dans certaines juridictions). En effet, le système de la « négociation des chefs d’accusation » entre l’accusé et le procureur avec l’applicabilité de la grille issue du manuel de prononcé des peines, permet une justice plus rapide, mais surtout parce qu’elle se fonde sur la crainte du justiciable, défavorisé culturellement et socialement, traditionnellement discriminé, d’être condamné plus lourdement devant un jury. Ce système est d’autant plus pervers qu’il est apparemment rationnel et objectif, alors qu’il déshumanise le processus d’élaboration de la décision judiciaire.


  1. Conclusion


« Le système de loi et d’ordre est tranquillement, mais très efficacement, en train de s’adapter à la modernité, de devenir un enfant de l’industrialisation. Les valeurs centrales sont ici la clarification des buts, le contrôle de la production, la réduction des coûts, la rationalité et la division du travail. » (p.178)

Nils Christie dénonce l’oubli total de l’irrationalité du crime, et de ses conséquences, tant pour le délinquant que pour la victime, qui sont écartés du procès pénal au profit d’une rationalisation des moyens et des objectifs. Il estime réel le risque de dérive des sociétés démocratiques vers le totalitarisme par un contrôle d’une population jugée dangereuse, les pauvres.




L’auteur s’inspire de l’ouvrage de Zygmunt Bauman, « Modernité et Holocauste » (1° éd. 1989, éd. fr., La Fabrique, 2002). Il analyse la thèse de cet ouvrage qui montre que la monstruosité la plus absolue est issue d’une société moderne et rationnelle qui déshumanise les comportements et rend acceptable l’inacceptable, ainsi de la bureaucratisation qui parcellise l’horreur pour aboutir à ce qu’il appelle « la production sociale d’indifférence morale » (p.185).


Christie applique cette analyse aux mécanismes de rationalisation de la justice moderne, dont les Etats Unis constituent le paradigme. Il ne prétend nullement que les politiques pénales des sociétés occidentales soient comparables à la politique nazie d’extermination, mais que le mécanisme dégagé par Bauman est applicable à la réflexion sur cette évolution.


En effet, la logique du système pénal, tel qu’elle se dégage de son étude, démontre qu’une certaine part de la population, aux Etats-Unis les hommes noirs et jeunes, a une quasi fatalité à être criminalisée par ce système. De ce fait, l’Etat s’approprie le contrôle d’une classe entière de population qu’il juge dangereuse et qu’il élimine, au sens où l’emprisonnement est une peine d’élimination. « Les systèmes répressifs modernes portent en eux les germes de goulags à l’occidentale » (p.21).


Christie pose en conclusion le problème du rôle de la loi dans la société qui, selon lui, a glissé du domaine du pouvoir et de la politique à celui de la production. Elle s’éloigne ainsi de ce qui en est le fondement et le but, l’expérience humaine En se plaçant du point de vue de l’utilité, en devenant un simple système de gestion des populations, la loi a perdu son rôle culturel et social de représentation des valeurs fondamentales de la société dont elle est issue.



  1. Réflexions en forme de conclusion.


La thèse développée par Nils Christie est terrifiante et, malheureusement, très convaincante. Elle pourra utilement, pour la France, être confrontée à des travaux comme ceux d’Anne-Marie Marchetti sur les rapports entre la pauvreté et la prison, ou à ceux de Pierre Tournier et d’Annie Kensey sur l’évolution de la population carcérale.


On peut également ajouter à la réflexion sur cet ouvrage l’analyse développée par Loïc Wacquant dans son dernier livre, « Punir les pauvres » (éd. Agone, 2004, 346 p.) qui, par exemple, montre que les prisons sont aujourd’hui, en population, la quatrième ville des Etats-Unis après New-York, Los Angeles et Chicago…


On peut regretter que Nils Christie ne prenne pas en compte dans son argumentation d’autres aspects de la criminalité qui n’entrent pas dans sa grille de compréhension du phénomène de développement de l’incarcération. Ainsi, il n’y a aucune analyse de certaines formes de délinquance en hausse, comme la délinquance sexuelle par exemple.


On peut aussi regretter, mais parce que cela aurait conforté son analyse de la prison comme mode d’organisation du contrôle social des classes dangereuses, qu’il ne fasse pas d’analyse comparative avec les pays asiatiques où le contrôle social, comme en Chine, n’est pas tant celui des pauvres, que d’une autre classe dangereuse, celle constituée des individus qui pensent différemment.


Et enfin, il est dommage que le titre original du livre de Nils Christie n’ait pas été traduit littéralement, car il me semblait plus éclairant : « crime control as industry » ou « le contrôle du crime comme industrie ». Ce titre avait une connotation plus sociétale en ce qu’il montrait davantage qu’au delà même de la prison comme punition, existe tout un système de contrôle de la population qui constitue une véritable industrie ayant une valeur économique en développement et qui, par le poids qu’elle représente, influence les politiques pénales des Etats.


En tout état de cause, au moment où la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité fait son entrée en droit français, au moment aussi où de nouveaux programmes de construction de prisons à gestion déléguée sont censés résoudre le problème d’une surpopulation carcérale jamais atteinte, le livre de Nils Christie ouvre d’intéressantes mais pessimistes réflexions sur l’évolution de notre système répressif.





Annexes.



NOTA : il n’y a pas d’index


  1. Bibliographie.


  1. Table des matières.


  1. Biographie de l’auteur.



Fiche de lecture : L’industrie de la Punition. Prison et Politique Pénale en Occident. Nils. CHRISTIE


MINISTERE DE L’INDUSTRIE ET DE LA PROMOTION DU SECTEUR
PROJET DE DISCOURS INAUGURAL DU MINISTRE DÉLÉGUÉ À L’INDUSTRIE
RENSEIGNEMENTS GÉNÉRAUX NOUVELLE STRATÉGIE DU MANITOBA VISANT L’INDUSTRIE DE


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