CORRIGÉ SYNTHÈSE LA FÊTE ET LE RAPPORT








Corrigé - Synthèse La Fête et le rapport au Temps

Corrigé - Synthèse : La Fête et le rapport au Temps


La vie peut-elle être une fête perpétuelle? Si l'on veut garder à certaines journées leur caractère exceptionnel, la réponse ne peut être que négative. Les jours de fête correspondent à des moments précis qui peuvent varier selon les cultures et les époques, introduisant dans le quotidien une rupture associée à l'irruption du passé et des rites anciens.

A la fois dans et hors du temps, les fêtes entretiennent donc avec cette dimension un rapport complexe qu'étudient sous l'angle du sacré deux anthropologues de renom, R.Caillois, en 1938, dans L'Homme et le Sacré, suivi par Mircea Eliade en 1957 dans Le Sacré et le Profane. Cette approche est complétée plus récemment par l'oeuvre du critique littéraire M. Bakhtine, étudiant dans l'oeuvre de Rabelais Les formes et images de la fête populaire.

Comment expliquer les traditions festives et leur permanence?


Les études des ethnologues insistent sur ce fait, particulièrement depuis le début du XXème siècle, les sociétés archaïques et les peuples primitifs actuels partagent des traditions communes, qui s inscrivent donc aussi bien dans l'espace que dans le temps.

Ainsi le combat pour la création du monde , la cosmogonie, se retrouve dans les temps anciens aussi bien chez les Babyloniens dans les premiers jours du Nouvel An que chez les Hittites ou les Egyptiens, selon Eliade. A l'époque actuelle, Indiens d'Amérique du Nord et Eskimos partagent le même besoin de célébrer l'hiver, temps de resserrement, par des cérémonies religieuses et des danses rituelles selon Caillois, idée confirmée par Bakhtine qui montre la diversité des formes du Carnaval, Si répandu dans les campagnes à l'époque de Rabelais.

Mais cette extension dans l'espace se double d'une inscription plus complexe dans le temps. Ces fêtes sont des réactualisations de mythes ancestraux et leur présence constitue une forme archaïque de retour dans le passé, de rupture dans la continuité ab origine, nous précise M. Eliade. De même, Caillois nous décrit pendant le temps particulier des fêtes, une véritable immersion dans le sacré, la résurgence de mythes et de rites primitifs qui peuvent ainsi échapper au Temps. De façon voisine, Bakhtine souligne également cette transmission des traditions en montrant que les formes populaires du Charivari se retrouvent dans le Carnaval, et qu'elles constituent la part temporelle des fêtes religieuses. C'est donc cet autre versant des fêtes qu'illustreraient les formes populaires du Carnaval, l'une des mieux conservées, et que l'on retrouve avec des variantes voisines dans les différentes fêtes agricoles occidentales, selon le critique littéraire.

Ainsi les fêtes que l'on retrouve quelles que soient les cultures, peuvent véhiculer deux fonctions complémentaires: elles s'inscrivent dans notre calendrier, à intervalles fixes, mais échappent au temps linéaire, en réactualisant périodiquement ces traditions ancestrales.


Quelles sont donc les raisons de ce rapport complexe au Temps, qui a survécu jusque dans les formes actuelles de la Fête?

L'une des explications se situe dans le besoin des hommes de lutter contre le temps. L'homme décrit par R. Caillois calque son existence sur l'alternance des saisons, les Eskimos et les Indiens distinguent saison des fêtes/hiver et vie estivale/laïcité. Face à la linéarité du quotidien, l'éternel retour des fêtes permet de vaincre les forces du chaos primitif toujours prêt à renaître. Tel est aussi le sens véritable des cosmogonies primitives, selon Eliade, dont la véritable fonction est de recréer le Temps primordial.

En fait, le point commun de toutes ces fêtes, présent à des degrés plus ou moins apparent, est le besoin de régénérer le temps. Les traditions ancestrales du Nouvel An, décrites par Eliade avaient cette fonction, d'où les nombreuses cérémonies de purification qui ont pu être relevées. De même, c'est bien le Temps ancien qui est détrôné dans le Carnaval à l'époque de Rabelais, et remplacé par le Temps nouveau. Et si, à la dispersion de l'été s'oppose la concentration de l'hiver vécue comme une fête chez les Eskimos, observés par R. Caillois, c'est parce que cette période est pour eux un véritable retour aux sources de la famille et de leurs traditions. Même actuellement, dans nos fêtes populaires, c'est cet aspect libéré du Temps qui survit, le temps joyeux dont parle Bakhtine.


Ainsi les fêtes sont présentées dans la documentation proposée comme les portes de notre mémoire, mais aussi des forces vivantes du passé, un élément indispensable pour l'équilibre de l'individu comme celui de la société.

Face à la solitude de l'homme moderne soumis à des règles trop souvent strictes, dans des sociétés qui tendent à s'uniformiser, elles recréent une communauté, reliant - comme les religions dans le passé - les hommes entre eux, faisant renaître, de manière inconscience, le temps des Origines.







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